Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2024 qui est mis en débat le 24 octobre prochain à l’Assemblée nationale, n’a manifestement pas pris la mesure de l’aggravation des difficultés qui frappe de plein fouet l’ensemble du secteur médico-social, social et sanitaire. Cette crise profonde des politiques des solidarités et de la santé appelait une vision globale et des mesures ambitieuses, et non un nouveau PLFSS de transition et d’économies. Face aux insuffisances et impasses de ce texte, l’Uniopss propose 28 amendements visant à soutenir les acteurs de la protection sociale.
Alors que l’ensemble des structures, qu’elles soient sanitaires, médico-sociales et sociales sont confrontées à l’inflation et à des difficultés extrêmes pour recruter et rendre attractifs des carrières et parcours professionnels, le PLFSS 2024 ignore les tensions financières liées à l’effet ciseau entre augmentation des dépenses et baisse des recettes. Il n’apporte pas non plus de réponses aux besoins croissants des personnes âgées, malades et en situation de handicap. Nouveau PLFSS de transition en attente de lois et de réformes structurantes, ce texte ne répond pas aux enjeux liés au vieillissement de la population, au défi de l’inclusion et à l’ampleur du désarroi des professionnel.le.s, des structures et en particulier des associations qui les emploient et, en conséquence, de la dégradation de l’accueil, des soins et de l’accompagnement des personnes.
Ce PLFSS ne propose pas, par ailleurs, la vision globale nécessaire à la construction d’une politique ambitieuse pour l’autonomie et la santé.
Que ce soit en matière d’accès à la santé pour toutes et tous ou de santé mentale (et notamment la psychiatrie), les mesures prises ne concernent qu’un aspect minime d’une problématique d’envergure. Les questions de prévention se résument seulement à la mise en place de rendez-vous à des « âges clés » de la vie, et pour les plus de 18 ans uniquement, quand cette prévention mériterait plus d’investissements, « d’aller vers » et de financements pérennes, avec une inclusion des plus jeunes.
Par ailleurs, alors que l’objectif de promotion de l’approche domiciliaire et d’aide aux aidants est proclamé dans tous les discours, aucune mesure nouvelle sur le domicile n’est présente dans ce projet de loi. La réforme des services autonomie à domicile (SAD) vient confier à ces derniers des missions de prévention auprès des personnes accompagnées. En ce sens, nous demandons que soient élargis et sécurisés les financements CNSA des conférences des financeurs pour la mise en place d’actions de prévention individuelle. Enfin, pour soutenir les porteurs de projet d’habitat inclusif, levier incontournable de l’adaptation de la société à la perte d’autonomie, nous souhaitons que leur soit étendu le bénéfice du taux de TVA à 5,5 %.
On note également une absence d’ambition sur la politique de l’autonomie et le soutien aux établissements accueillants des personnes âgées. Le fonds d’urgence de 100 millions d’euros apparait ainsi très insuffisant face aux taux de défaillance inédits des établissements et services (80 % d’entre eux étaient d’ailleurs en déficit fin 2022). Outre l’instauration d’un observatoire national de l’autonomie afin de mieux connaitre les besoins pour adapter l’offre, il semble opportun de prévoir un soutien aux acteurs du médico-social, à la transformation de l’offre et à la modernisation de leur fonctionnement, en assurant un financement pluriannuel de crédits d’ingénierie et d’aide à la conduite du changement (organisationnel, managérial...).
Sur le secteur du handicap, l’annonce de l’extension de la logique de repérage et d’accompagnement précoce auprès des plus jeunes (0-6 ans) est une réelle avancée. Il s’agit d’une opportunité rare de rapprocher des acteurs (professionnels de santé, services de la PMI, médico-social, Éducation nationale...) autour de l’accompagnement d’enfants pour lesquels le repérage précoce est l’un des outils de prévention du handicap.
Mais sur ce champ, le texte peut être enrichi autour de deux axes. Dans la perspective d’une politique de soutien à l’autonomie sans frontière, l’Uniopss plaide depuis longtemps pour une abrogation de la barrière d’âge pour bénéficier de la prestation de compensation du handicap (PCH). Toujours dans le sens d’une appréhension holistique de l’autonomie, et des prestations qui lui sont liées, il semble opportun de travailler ensemble aux contours d’une prestation universelle d’autonomie. Cette dimension transversale trouve également écho dans l’un des scenarios cibles du rapport rendu en juillet 2023 par la députée Christine Pirès Beaune sur le reste à charge en Ehpad.
En outre, et parce que la dynamique de transformation de l’offre encourage à aller toujours au plus près des personnes et sur leur lieu de vie, il paraît indispensable de créer un observatoire national du transport sur le champ de l’accompagnement des personnes en situation de handicap, compte tenu, notamment, de l’explosion des frais liés à ce poste de dépenses dans les ESMS du secteur.
Enfin, nous déplorons qu’à l’heure où la crise écologique est si criante et impacte notre quotidien, le PLFSS ne propose pas de mesures d’investissement suffisantes pour accompagner les acteurs sanitaires, sociaux et médico-sociaux dans une meilleure prise en compte des recommandations de lutte contre le réchauffement climatique. En effet, au-delà de la compensation des augmentations tarifaires et même de l’extension du bouclier tarifaire, la question d’un véritable plan d’aide à la transition énergétique apparaît cruciale
Contact presse : Valérie Mercadal - Tél. 01 53 36 35 06 – vmercadal@uniopss.asso.fr