La ministre Charlotte Parmentier-Lecocq a annoncé que le Comité interministériel du handicap (CIH) du 6 mars 2025 marquera une « nouvelle étape d’orientations et d’engagements concrets ». Remboursement intégral des fauteuils roulants par l’Assurance maladie à partir du 1er décembre 2025, premières mesures de simplification pour alléger les procédures des dossiers MDPH, déploiement de 500 pôles d’appui à la scolarité (PAS) à la rentrée 2025, des mesures pour la plupart déjà connues de longue date.
École pour tous : un manque de volonté pour une réelle inclusion scolaire de qualité
Suite au Comité national de suivi de l’école inclusive, le gouvernement se félicite d’une hausse continue du nombre d’enfants en situations de handicaps scolarisés à l’école ordinaire. Toutefois, cette hausse se base uniquement sur des données quantitatives. Quid de la qualité de cette inclusion scolaire, et notamment du volume d’heures de cours hebdomadaires, des notifications d’AESH non pourvues ? L’Uniopss s’associe au Défenseur des Droits pour demander de mettre en place des outils statistiques permettant d’appréhender les modalités et le temps de scolarisation effectif des élèves en situation de handicap, le temps de présence des AESH et les accompagnements pédagogiques mis en place. Depuis 2017, la volonté affichée du ministère de l’Éducation nationale est « d’adosser l’offre médico-sociale à l’école ». Pour l’heure, les établissements du secteur médico-éducatif relèvent du ministère des Solidarités. Mais plusieurs associations, dont APF France handicap, membre de l’Uniopss, plaident pour les transférer sous l’égide du ministère de l’Éducation nationale : au lieu d’avoir des enseignants détachés dans les IME, pourquoi ne pas envisager l’inverse, en détachant des professionnels du médico-social à l’école ordinaire ? Pour pouvoir advenir, les moyens de ce rapprochement doivent être budgétés dans le PLFSS 2026.
Vers des sanctions pour les établissements ne respectant pas les normes d’accessibilité ?
L’accessibilité devait faire l’objet du focus de ce CIH, 50 % des établissements recevant du public n’étant toujours pas aux normes, en dépit de l’obligation depuis la fin officielle des Agendas d'Accessibilité Programmée le 26 septembre 2024. Alors que les fonds territoriaux d’accessibilité prévus à cet effet restent encore trop peu mobilisés, la ministre annonce que des contrôles vont avoir lieu auprès des établissements « n’ayant pas entrepris de démarches en matière d’accessibilité » et des sanctions « pourront être prononcées » à l’issue.
Mais pour l’accès au logement et l’accessibilité universelle, le compte n’y est pas !
Toutefois, la ministre se dit opposée à une révision de l’article 64 de la loi ELAN réduisant le taux de logements accessibles dans les constructions neuves de 100 % à 20 %, faisant de l’accès au logement des personnes en situation de handicap un véritable parcours du combattant, comme le rappelait récemment la Fondation pour le Logement des Défavorisés dans son rapport annuel. De plus, l’accessibilité des lieux recevant du public ne se limite pas à la question du bâti. Le personnel d’accueil doit également être formé aux enjeux des handicaps invisibles, comme les Aéroports de Paris, avec l’initiative du cordon tournesol pour informer discrètement le personnel qu’une personne peut avoir besoin d’un peu plus d’attention, d’aide ou de temps supplémentaire durant son parcours. Enfin, l’héritage des Jeux Olympiques et Paralympiques vient rappeler que l’accessibilité universelle comprend aussi la citoyenneté culturelle, incluant les loisirs, le sport et les modes de vie, notamment l’accessibilité aux programmes audiovisuels et à l’offre culturelle.
« Choc de simplification » des procédures MDPH : des mesures déjà prises par décret !
L’ouverture de droits à vie pour les personnes dont le handicap est insusceptible d’évoluer favorablement est une mesure qui avait été annoncée sous le mandat de Sophie Cluzel, et qui a été actée par deux décrets datant de décembre 2018. Cela existe donc déjà, le problème vient du fait que cette ouverture de droits à vie n’a pas un caractère systématique et est encore trop mal appliquée sur l’ensemble du territoire. De même en cas de déménagement : les MDPH sont censées transmettre les dossiers, mais il manque souvent des pièces ou des informations. En outre, cela ne résoudra pas la problématique de la sous-évaluation de nombreuses situations de handicap et de l’attribution des moyens de compensation au gré du budget des départements, avec de grandes disparités territoriales.
Le fait est que les MDPH sont aujourd’hui sous dotées, tant en termes de moyens humains que de financements, faisant face à un volume de demandes en constante augmentation
(+12 % entre 2015 et 2022), et qu’elles n’ont plus les moyens de remplir correctement leur mission d’évaluation des situations de handicap par une approche pluridisciplinaire centrée sur le projet de vie des personnes qui ne limite pas à un regard médical. À cela, l’IA n’apportera pas de réponse mais risque de déshumaniser encore plus le rapport à l’administratif.
Le CIH du 6 mars vient donc poursuivre la mise en œuvre des mesures annoncées lors la CNH 2023, sans porter d’ambition nouvelle ni fixer de cap pour 2025, alors que les trésoreries des associations sont exsangues, dans un contexte inédit dans la Ve République, où les lois de finances ont tardé à paraître. La question de la tenue d’une prochaine CNH à son échéance normale en 2026 mérite alors d’être posée.
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Valérie Mercadal
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